« Et arrivées au bout nous prendrons racine » : l’étoile montante de Kristina Gauthier-Landry

Depuis sa sortie le 11 juin, Et arrivées au bout nous prendrons racine de l’autrice Kristina Gauthier-Landry connaît un succès inespéré. Déjà que le recueil de poésie s’est hissé dans le top 100 des ouvrages les plus vendus sur le site leslibraires.ca lors de l’événement « Le 12 août, j’achète un livre québécois », les Éditions La Peuplade ont annoncé une première réimpression.

En raison de la COVID-19, Kristina n’a pas pu célébrer le lancement de son premier recueil exactement comme elle aurait voulu. « C’est sûr que ça m’a fait un petit quelque chose, je suis une fille de party, j’aime ça voir mon monde », confie l’autrice, en précisant qu’elle n’était pas pressée de publier ses poèmes. « Je me suis dit “Il aura la vie qu’il aura” ». Quelques semaines plus tard, elle lie le contexte de la pandémie au succès de son recueil. « Je pense que ç’a répondu au caractère “isolé” du livre, que ça pouvait résonner avec ce qu’on vivait en confinement. »

Parce qu’Et arrivées au bout nous prendrons racine parle de la réclusion de la Côte-Nord malgré l’immensité de ses espaces, de la beauté du territoire mais aussi des écueils d’un quotidien souvent amarré à la pêche. Le recueil trace le chemin d’une enfance sur la côte puis d’un retour aux sources à l’âge adulte, une drôle de coïncidence selon l’autrice, qui avait mis de côté l’écriture pendant plusieurs années. « J’ai toujours été attirée par l’écriture, relate-elle. Quand j’ai eu 30 ans, j’ai eu envie de reconnecter avec cet amour-là ».

C’est à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) qu’est né son recueil, entre 2015 et 2019, tout d’abord en courtes histoires, puis en poèmes tout aussi courts. Il n’y avait pas l’objectif initial de raconter la Côte-Nord, mais la région et les souvenirs qui y sont reliés se déployaient en filigrane. « On dirait que parallèlement à mon envie de retourner vers l’écriture, il y a eu un besoin de reconnecter plus profondément avec mes racines macacaines. » L’autrice originaire de Natashquan se défend bien d’avoir voulu écrire un guide touristique de la région, exprime plutôt la nécessité de « mettre des mots sur des ressentis, sur ce qui faisait que quand je quittais Montréal pour retourner chez mes parents, je me sentais de telle ou telle façon ».

L’envie de nommer les choses, « d’arriver à mettre le doigt sur la façon de le dire » est imbriquée dans chacune des 128 pages du recueil. « J’aime vraiment essayer de décrire une odeur, un goût, une texture. Il y a quelque chose de très sensoriel dans mon approche », dénote-t-elle. Le langage est dépouillé, les métaphores s’enfilent et le tout se lit presque comme une chanson. Les souvenirs d’enfance, « ça sent l’été / les hot-dogs grillés / le ketchup dessine des cœurs / sur nos joues » côtoient la solitude des jours pesants sur un territoire parfois hostile, « il est grand le nord / la nuit / tu égorges le sommeil à mains nues / nous l’étendons en longues traînées rouges / sur le blanc ».

Et arrivées au bout nous prendrons racine est-il un éloge à la jeunesse, au retour aux racines? S’agit-il d’être habité par la Côte-Nord, d’en peindre un portrait style roadtrip ? Décortiquer les poèmes, bien peu pour Kristina. « Je veux que les gens lisent [mon recueil] et se disent ce qu’ils ont envie de se dire. Pour moi, moins on en explique, mieux c’est. Comme ça, ça laisse la place à toutes sortes d’interprétations. »

Lauréate des prix Nouvelles Voix 2018 et Geneviève-Amyot 2019, Kristina Gauthier-Landry ne sait pas quelle forme prendra son avenir d’autrice. Chose certaine, l’écriture est devenue une trame narrative : « Je suis née dans les mots et je vais mourir dans les mots ».

Laurence Dami-Houle | Initiative de journalisme local

Bachelière du programme de journalisme de l'Université du Québec à Montréal. Amoureuse des mots, bibliophile et cinéphile. Intéressée par les enjeux culturels, l'environnement et la politique.

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